Chaque 10 octobre, le monde célèbre la Journée mondiale de la santé mentale. En 2025, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) met l’accent sur « l’accès aux services de santé mentale dans les situations d’urgence et de catastrophes ». En République démocratique du Congo, le ministère de la Santé, à travers son Programme national de santé mentale, a adapté ce thème en soulignant la nécessité de « promouvoir la santé mentale et le soutien psychosocial pour une paix durable ».
À Goma, une conférence organisée au Centre de formation continue du Nord-Kivu par la Division provinciale de la santé a réuni acteurs locaux et organisations œuvrant dans le domaine de la santé mentale. L’objectif : venir en aide aux populations durement touchées par les crises et les urgences liées à la guerre.
Les discussions ont mis en lumière l’importance de renforcer l’accès aux soins psychologiques dans un contexte marqué par les conflits, les déplacements massifs et la pauvreté. Madame Sivita Gasonya Rose Pierrette, psychologue de formation et responsable de la santé mentale pour la mission ALIMA RDC, a rappelé que « les femmes et les enfants sont les premières victimes des catastrophes et des urgences. Les enfants sont terrifiés par les crises et les catastrophes ; ce sont les personnes les plus vulnérables ».
Elle a souligné la nécessité de donner la priorité aux femmes, aux enfants et aux personnes du troisième âge dans la prise en charge psychologique, car les déplacements les affectent davantage. « La prise en charge psychosociale est une approche qui prend en compte à la fois le mental, l’aspect psychologique de la personne et sa communauté », a-t-elle précisé.
L’organisation ALIMA, présente dans tout le Nord-Kivu à Goma, Beni, Bunia, Butembo, Masisi, Lubero, etc. offre des soins de santé mentale et physique aux populations affectées par la guerre. Selon Mme Sivita, il est urgent de renforcer les dispositifs communautaires pour encadrer les personnes victimes de troubles psychologiques et leur redonner espoir.
De son côté, Bamba Mande, agent à la Division provinciale de la santé mentale, a insisté sur l’importance de faire connaître les services disponibles : « La population doit savoir que notre service existe et qu’elle peut y recourir en cas de besoin. Les urgences de santé mentale au Nord-Kivu sont nombreuses, aggravées par l’insécurité et la guerre ».

Pour lui, le thème national choisi « Promouvoir la santé mentale et le soutien psychosocial pour une paix durable » doit se traduire par une action concrète à tous les niveaux, depuis les structures sanitaires jusqu’aux communautés de base.
Jean-Marie Vianney Basabose, infirmier neuropsychiatrique dans le projet Frakarita Goma, a rappelé l’importance de la prévention :
« Nous sensibilisons la population à mutualiser les forces afin de vivre comme une famille et prévenir les troubles de santé mentale. Nous menons des activités de prévention et de sensibilisation sur la prise en charge psychosociale et psychologique, tout en suivant les personnes déjà affectées ».
Durant la semaine de la Journée mondiale, le Centre neuropsychiatrique santé mentale de Goma a organisé des consultations gratuites avec des psychiatres et psychologues, afin de permettre aux personnes souffrant de troubles psychologiques de se faire diagnostiquer et accompagner.
Selon Jean-Marie Basabose, « la santé mentale contribue énormément à la paix ; la stabilité d’une société passe aussi par la guérison des blessures invisibles ».
Malgré les efforts conjoints des autorités, des ONG et des professionnels de santé, un fossé persiste entre l’ampleur des besoins et les capacités de réponse. « Il y a toujours un écart entre les urgences, les besoins et la riposte », reconnaissent plusieurs intervenants. Les acteurs appellent à un renforcement du financement, de la coordination et de la formation des intervenants communautaires pour faire face à la montée des troubles psychiques liés aux violences et aux déplacements prolongés.
Garantir l’accès à la santé mentale dans les situations d’urgence, c’est protéger la vie, la dignité et l’avenir des populations. En inscrivant la paix au cœur de sa politique nationale de santé mentale, la RDC envoie un message fort : la paix durable ne se construira pas seulement par les armes ni par les accords, mais aussi par la guérison des traumatismes invisibles.

