Beni, dans la province du Nord-Kivu, dans l’Est de la République Démocratique du Congo, subit au quotidien depuis 2014, les affres de la guerre des Terroristes des Forces Démocratiques et Alliés-ADF/MTM et plusieurs autres groupes armés, composés principalement des membres des communautés locales.
La situation s’est aggravée avec la guerre du M23, qui occupe quelques villages et cités dans les territoires de MASISI et RUTSHURU, rendant ainsi difficile le transport de certains produits agricoles et commerciaux ainsi que le mouvement de la population.
Le trafic routier Butembo-Goma, passant par RUTSHURU et KIWANJA étant suspendu.
La ville de BENI fait partie des trois principales villes de la province du Nord-Kivu, en l’occurrence la ville de Goma, chef-lieu de la province et celle de Butembo. Sa population vit en majorité des activités champêtres.
Mais avec les attaques récurrentes des ADF et l’agression du M23 soutenu par l’armée Rwandaise RDF, tout a basculé et s’est compliqué pour les habitants de cette partie du pays.
Qu’est-ce qui a changé dans le quotidien des habitants ?
« Bien avant la vente marchait très bien, parce que nous recevions des produits venant des cultivateurs à Mayangose et Kididiwe. On se procurait à bon prix, et quand on revendait on trouvait du bénéfice. Actuellement c’est difficile. Le commerce ne marche plus parce que c’est du champ qu’on trouvait la marchandise. Nous trouvons la marchandise très loin d’ici, à KASINDI, et loin ailleurs. Arrivés ici, on est obligé de hausser le prix. Le produit n’est plus vendu comme avant », témoigne KAVIRA MBITHI, une vendeuse au petit marché Mayangose Kiprihani, au quartier Boikene.
« Depuis que notre zone est sous l’emprise de M23 et de l’ADF, nous en tant que population de Beni, surtout nous parents, nous sommes en difficultés majeures. Il est difficile maintenant d’accéder à nos champs, d’où nous voyons difficile de scolariser nos enfants. Trouver quelque chose pour les frais scolaires c’est difficile. Même à manger. Cela a touché le panier de la ménagère, nous sommes en train de vivre des difficultés par rapport à comment subvenir aux besoins de nos familles comme parents. Mais aussi cela joue sur le rendement de nos champs, parce qu’il est difficile d’accéder à nos champs et ça ne nous permet pas de vivre aisément dans notre zone », ajoute SAMUEL DON SEKANABO, un responsable de famille, à Beni.

KATEMBO MATHE Trésor, un cultivateur de Mayangose dit être en difficulté de subvenir aux besoins de ses enfants et toute sa famille l’occasion de plusieurs étant dans l’impossibilité d’accéder à ses champs
« Mes enfants ne vont plus à l’école » lâche-t-il
Peur au ventre, la population ne sait plus se ravitailler en vivres dans les champs et les zones sous l’emprise des ADF
Le territoire de Beni situé au nord de la province, partage la frontière avec l’Ouganda. Si la ville vit une sécurité apparente, la psychose est bien palpable dans le chef des habitants qui appellent les autorités à tout faire pour rétablir la paix et la sécurité sur l’ensemble de la partie Est du pays.
Plusieurs entités du territoire de Beni, notamment la foret de Mayangose, Kididiwe, Halungupa, Kadou et bien d’autres agglomérations à la limite avec le parc national des VIRUNGA au Nord-Kivu, Idohou, Mambelenga, Ndalya, Otomabere, Ahodi etc dans une partie de la province voisine de l’ITURI, sont des zones phares qui alimentent la ville de Beni en produits de première nécessité, issus des activités champêtres.
« Ici chez nous à Mayangose, vers Kididiwe nous avons appris que même certains de nos cultivateurs ont été emportés par l’ennemi. Or c’est la forêt de Mayangose, Mambelenga, Idohu sur la route Beni-Komanda-Bunia et d’autres champs qui nous ravitaillent de la nourriture. Aujourd’hui nous avons peur d’y accéder à cause de ces ennemis qui nous massacrent. Malheureusement, sur la route Beni-Butembo et puis Goma, le M23 s’impose aussi. Nous sommes appauvris davantage », relate larmes aux yeux, KAMBALE PROPHÉTIE UNABII.
Le secteur sanitaire n’est pas épargné des conséquences néfastes des incursions répétitives des ADF. L’infirmier Titulaire du poste de santé TUNZO BORA, situé au quartier Boikene, en commune de Mulekera, dans la ville de Beni, déclare avoir fermé ses portes après l’attaque de sa structure par les ADF à 2014. Une infirmière avait échappé à la mort de justesse et plusieurs médicaments et matériels médicaux emportés. Il a rouvert ses portes il n’y a que deux ans.

« Le massacre s’est produit ici le 15 octobre des années passées. Nous avons fui notre milieu et le nombre de la population a baissé. Ça fait deux ans que nous avons repris le travail ici. Dans notre métier, nous recevons des patients, mais en petit nombre par rapport au temps passé. Il y a environ 10 personnes que nous recevons, mais elles ne sont pas en mesure d’honorer leurs factures. Voilà le problème », regrette l’IT KASEREKA LUSENGE.
Face à ces difficultés, PALUKU KAMABU MUKAMA, un habitant de Beni plaide auprès du gouvernement congolais, de tenter encore une fois la voie de négociation et de la diplomatie.
« La diplomatie, c’est la seule piste de solution qui nous reste parce qu’il semble que la guerre a échoué. Nous pensons qu’on doit suivre la piste de la diplomatie. Nous avons l’armée, mais elle est infiltrée jusqu’aux dents. Nous avons la police, mais qui n’est pas encore en mesure de mettre fin à l’insécurité urbaine. Nous pensons que la seule piste qui nous reste, c’est la diplomatie ».
« Nous sommes un peu déçus de constater que nous venons de fêter deux ans d’anniversaire de l’État de siège. La mesure a été instaurée par le chef de l’État. La mesure que nous avons accueillie avec pompe et avec joie. Cependant, nous sommes vraiment déçus des résultats de cette mesure, qui pour nous n’a pas été efficace. Au-delà de la force inutile de la MONUSCO, nous avons la force de l’EAC. Toutes ces forces-là, la population de Beni en particulier et celle du Nord-Kivu en général, et de l’Ituri, elle n’est pas constante, elle n’est pas satisfaite de la manière dont toutes ces forces sont en train de nous servir. Nous réitérons, la paix du Congo, la paix de Beni ne viendra que des citoyens congolais. Le gouvernement doit prendre ses responsabilités et la population aussi doit faire sa part » Insiste John KAMBALE LWATSIRENE, rapporteur général de la société civile de Beni.

Dans le petit nord de la province, les groupes d’autodéfense « Wazalendo », ont repris plus de 21 villages dans les territoires de Masisi et Rutsuru au Nord-Kivu, après des violents combats qui les ont opposés aux rebelles du M23. Toby Kahangu, président de la société civile de la chefferie de Bashali, a annoncé, lundi 9 octobre dernier, que les volontaires patriotes ont pris le contrôle de la cité de Kitshanga, après celle de Kilolirwe.
Il s’agit d’une cité très stratégique où les rebelles se sont retirés sans combats depuis la nuit, selon des sources concordantes.
Pendant ce temps, Héritier NDANGENDANGE, porte-parole du groupe armé APCLS, a déclaré depuis mercredi 10 octobre dernier, que leurs combattants accordent 48h aux troupes de L’EAC pour quitter le sol congolais. Une décision plus ou moins inattendue de la part des combattants Wazalendo œuvrant dans la partie Est de la RDC. Alors que la guerre a repris dans les territoires de Rusthuru et Masisi entre ces combattants se déclarant patriotes contre les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda.
Dans la partie grand nord, l’armée congolaise FARDC, appuyée par l’armée Ougandaise UPDF, s’est engagée dans les offensives contre les djihadistes ADF. Au cours de ces opérations conjointes, plus de 700 terroristes ont été neutralisés, des centaines capturées et d’autres se sont rendus à l’armée régulière suite à la pression du feu.
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