« Une femme n’a pas de religion. Il suffisait qu’elle tombe amoureuse d’un homme déjà accompli et elle change directement de religion. Ma future femme sera obligée de changer de religion s’elle veut qu’on soit mon épouse. Sinon, elle sera contrainte de partir » déclaré Fidèle, un jeune protestant.
À Goma, comme dans plusieurs coins de la République Démocratique du Congo, pullulent plusieurs tendances religieuses. Des tendances sociétales qui privent donc la femme sa liberté de croire en une doctrine qui va avec ses aspirations spirituelles.
Plusieurs parents encouragent ces pratiques, qui à la longue mettent à mal cette liberté de religion.
« Je façonne ma fille, de façon qu’elle puisse se marier à un homme de notre religion. Tout ça, c’est pour éviter qu’un gars païen ne vienne la tromper et aller l’amener dans une autre doctrine religieuse outre que la nôtre. Et si cela arrive un jour, je n’irai jamais à ce mariage malgré que ce soit ma fille » explique Prisca, mère de 5 enfants et adepte d’une église protestante dont Kivumornigpostpost tait le nom.
Loin d’elle, au à Kyeshero, Uwayo, adepte d’une église de réveil dont sa fille a accepté la main d’un homme de l’église catholique se dit choquée que sa fille ait accepté de passer les restants de ses jours avec lui. C’est une forme de malédiction et de honte, fait-elle savoir.
« Je suis diaconesse. Et notre église insiste toujours que nos filles soient épousées par les hommes qui partagent la même foi qu’elles. Malheureusement, elle a préféré convoler en justes noces avec un étranger. C’est un véritable échec. Mes amis au sein de l’église me font des reproches et me demandent pourquoi j’ai autorisé cela. J’aurais préféré que ma fille parte en système Kurendera » dit-t-elle avec remords.
Dans la ville de Goma, comme partout dans plusieurs coins de l’est du pays , le terme Kurendera désigne le fait pour une jeune fille de quitter le toit de ses parents pour aller cohabiter avec un autre homme sous le même toit sans procédures coutumières et civiles. De vieilles pratiques dans les cultures locales, en grande partie découragées.
L’ingérence des familles dans les relations amoureuses de leurs enfants, le manque des moyens de la part du garçon et de la fille, la défloraison de la jeune fille, les grossesses non désirées sont parmi les causes des rapts.
Divorce consomé entre parents et enfants. Sous un soleil encombrant, dans une ville qui respire l’air du lac-Kivu, les conflits des mariages se font signaler.
Monsieur Ajabu, agé 55 ans dévot croyant d’une église luthérienne et père de 7 enfants, a coupé contact avec sa fille qui a décidé d’épouser un garçon d’une autre religion. Dans le chagrin et l’amertume a côté de sa femme, il dit être déçu de sa fille qui est allée hors normes, à en croire ses propres termes.
« Elle m’a trahi en se mariant à un homme qui ne partage pas la même foi que nous. Je regrette de l’avoir fait scolarisée à l’université car c’est de là qu’elle a eu son époux là » regrette-t-il.
En dépit de toutes les pressions, sa fille Maombi qui s’est mariée en 2021 ne se sent aucunement fautive. Selon elle, son cœur est tombé éperdument amoureux, malgré qu’elle ne partageait pas sa religion. La religion ne bloque pas pourtant d’autres filles à rêver d’amour.

« Au début, j’avais des hésitations pour lui donner la main. J’ai attendu 3 mois avant de lui dire oui. De la première rencontre, il avait fait battre mon cœur. Une semaine après, j’ai senti qu’il avait presque toutes les qualités importantes de cet homme dont je cherchais tant. Sûrement, j’étais en connexion forte avec un autre gars de mon église, mais il était trop sérieux. Je me suis éloigné de lui malgré la persistance de mes parents. Je ne voudrais pas poursuivre une aventure amoureuse que je pourrais regretter tôt ou tard. Je suis exclue même par mes parents qui sont mes derniers remparts » raconte à Kivumorningpost, Carine 23 ans et mariée depuis 23 décembre 2022.
Elle ajoute qu’elle mène une vie heureuse auprès de son époux et espère que ceux qui ne la comprennent pas finiront un jour par la comprendre. Carine explique qu’après le mariage religieux célébré dans la paroisse de son homme, elle a désormais changé de foi et elle renseigne qu’elle s’épanouit. « La doctrine de notre religion n’allait pas m’empêcher de passer à coté de mon prince charmant » fait-t-elle savoir.
Nombreuses religions à Goma conseillent aux aspirants au mariage de se marier à ceux et celles avec qui ils partagent la même foi, une question d’honnête envers la foi dans le but d’avoir une vie heureuse.
« Dans la Bible, Dieu lui-même a encouragé aux Israelites d’épouser ceux et celles qui partagent leur foi. Abraham avait encouragé Isaac à épouser Rebecca. C’est parce qu’elle était de sa famille et de sa foi. Ceux qui épousaient les Cananéens étaient tombés dans l’idolâtrie et oubliaient Dieu. C’est Dieu qui a encouragé cela, c’est pour éviter des incompréhensions dans l’avenir et pour une bonne éducation de leur progéniture » rétorque Monsieur Abel qui est un évangéliste à Goma.
De quoi remettre en question la laïcité contenue dans la constitution de la RDC, qui prive les femmes et les filles le ciel tant recherché par nombreux croyants. Malgré que plus de 80% de sa population est chrétienne, la République démocratique du Congo est un pays laïc. Ce caractère laïc de l’État est inscrit depuis 1974 dans la Constitution.
En dépit de cette laïcité soulignée dans la constitution de la RDC, plusieurs cas d’exclusion et de discrimination se font observer à l’egard des quelques personnes suite à leurs convictions religieuses.
Les femmes et les filles sont les plus touchées par ces pratiques dans la société congolaise.
Les noms cités dans cet article sont d’emprunt.
Si l’enfer est réellement réservé à des gens suite à leurs convictions religieuses, les femmes seront presque toutes en enfer sans le vouloir car elles sont contraintes de suivre les croyances religieuses de leurs maris.
Il n’y a pas de religion d’État et chaque Congolais est libre de pratiquer la religion de son choix quelle qu’elle soit.
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